NOTRE REGARD SUR L'ÉTHIQUE EN POLITIQUE
- La Nouvelle Morcenx
- 18 oct.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 19 oct.

Tous les hommes politiques, petits ou grands, nous parlent de la moralisation de la vie publique, et de l’éthique en politique ou de la déontologie. Pourtant, il n’y a jamais eu autant de personnages politiques concernés par des procès.
Fabrice Lachenmaier, président de La Nouvelle Morcenx, ancien fonctionnaire d’Etat et ancien élu, auteur de l’ouvrage « Une éthique pour le citoyen » (2005) s’exprime sur le sujet.
Comment définiriez-vous l’éthique en politique ?
F.L. : « L’éthique en politique, parfois appelée morale politique, ou éthique publique, désigne la pratique consistant à formuler des jugements moraux sur l'action politique. Elle fait référence à des valeurs comme l’intégrité, l’impartialité, le respect, la compétence et la loyauté, qui permettent de veiller à l'intérêt public ».
Elle peut aussi être porteuse de valeurs plus larges comme le respect des normes environnementales ou écologiques ou bien par exemple elle peut encourager à évaluer le coût intégral d’une décision et les économies induites de manière à permettre des choix qui avantagent un bon rapport entre la qualité du service et le coût d’une prestation.
Dans la plupart des cas, on constate que les décisions politiques se référant à l'éthique sont en fait plus économiques que moralistes, du moins à long terme. Ainsi, pour les collectivités locales et territoriales, la première des règles en matière budgétaire c’est par exemple de voter un « budget sincère et équilibré ».
Mais alors pourquoi parle-t-on de moralisation de la vie publique ?
F.L. : « Beaucoup de faits divers ont illustré la vie publique, notamment en matière d’attribution frauduleuse de marchés publics à des entreprises bien connues qui, par le biais de rétro-commissions, reversent de l’argent à des élus, ou de financements illégaux de campagne électorale, ou l’acceptation de cadeaux sous le biais d’avantages en nature qui peuvent aller très loin, jusqu’à la construction d’une maison ou d’une piscine. On constate aussi la multiplication de syndicats mixtes qui servent à abriter tout et n’importe quoi, dont parfois les dettes souscrites par une collectivité qui a intérêt de les cacher. Tout cela est bien sûr assorti souvent d’enrichissement personnel de la personne qui commet les faits avec la complicité d’un ou plusieurs décideurs.
Dans tous les milieux, privés ou publics, des phénomènes de malversations existent ».
Cette situation de corruption est-elle irréversible ?
F.L. : « Pour les fonctionnaires, les administrations d’Etat ont fait en sorte que les procédures relatives au Code des marchés publics soient régulièrement revues, par exemple. Elles se sont dotées également d’un arsenal de textes qui permettent de punir les fonctionnaires indélicats, soit en utilisant le moyen des sanctions disciplinaires, ou si c’est plus grave en assignant au Tribunal pénal les personnes ayant commis des délits.
Pour les élus, une Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a été créée. Elle les oblige à déclarer leur patrimoine pour éviter tant l’évasion que la fraude fiscale. Les financements des campagnes électorales sont également encadrés. Les Plans locaux d’urbanisme et d’habitat et leur règlement sont également censés éviter des dérives immobilières de surclassement ou déclassement de parcelles.
Mais chacun comprendra que malgré tout cet attirail législatif -qui était nécessaire pour assainir la vie publique-, la complexité financière et juridique de certaines affaires à ramifications internationales, et les appétits d’ogres de certains pour l’appât du gain, ont en fait conduit à la judiciarisation de la société, car seuls les voyous ont changé d’aspect, mais ils sont toujours là.
En fait, celui qui veut commettre un délit trouve toujours le moyen de le faire, quelles que soient les clauses de sauvegarde ou les mesures coercitives prises ».
Que faut-il en déduire ?
F.L. : « On en déduit qu’on a les élus que l’on mérite, et que si les citoyens ne les contrôlent pas, c’est la porte ouverte à toutes les malversations, au copinage, aux abus de pouvoir, au harcèlement moral ou sexuel, à la concussion, aux phénomènes d’élus qui sont juges et parties et qui ne s’en rendent plus compte. C’est tout cela que l’on observe ».
Les citoyens expriment régulièrement leur colère mais n’ont pas forcément le courage de participer au changement indispensable ?
F.L. : « Saint-Augustin l’a très justement écrit : « L’espérance a deux magnifiques enfants : la Colère et le Courage. La colère face aux choses telles qu’elles sont. Et le courage nécessaire pour les changer ». Il faut savoir entendre la manifestation des colères lorsqu’elles s’expriment mais souvent il n’y a pas d’effets immédiats, faute de combattants courageux pour proposer de nouvelles voies. Aujourd’hui, le citoyen éprouve une lassitude face à la chose publique, une peur face au changement et reconduit donc toujours les mêmes élus…même si ces derniers ont usé et abusé du système… Il est donc difficile de lutter contre la résilience. Cette résilience est l’antichambre de la mort du citoyen. Accepter cette résilience, c’est accepter l’idée du laisser faire. C’est se détourner des urnes. C’est conforter les baronnies locales. Je constate que le citoyen est plus préoccupé - ce qui est légitime- par ses problèmes au quotidien comme par exemple le pouvoir d’achat et n’a pas forcément la disponibilité d’esprit pour réfléchir à son rôle de citoyen. C’est une question de priorité et accessoirement de courage ».
Quelle conclusion ?
F.L. : « D’aucuns pensent que la fin justifie les moyens. Or, à LNM on estime que l’éthique publique doit être au coeur de la démocratie participative et de la gouvernance locale. Cet axe sera central dans notre action, au travers de notre groupe, et pour l’intérêt général des Morcenais ».




Commentaires