ETRE AGRICULTEUR AUJOURD'HUI A MORCENX
- La Nouvelle Morcenx
- 9 déc. 2024
- 3 min de lecture

Des panneaux de ville recouverts de noir, la reprise de la mobilisation sur les routes des agriculteurs, le projet de traité Mercosur qui s’invite dans l’actualité, un gouvernement qui disparait avec un budget 2025 devant apporter quelques réponses au malaise paysan…
Nous avons voulu savoir pourquoi Morcenx-la-Nouvelle n’était pas considéré comme un territoire à forte valeur ajoutée agricole. Pour cela, il suffit d’interroger un représentant de cette profession.
Notre agriculteur est installé depuis plusieurs générations à Garrosse et s’inquiète pour l’avenir de son métier-passion : « Voici la réalité de ma vie d’agriculteur. Je viens de vendre la récolte 2024 de maïs avec un tonnage assez correct de 891 tonnes, soit un rendement d'environ 123 quintaux par hectare.
Oui mais voilà, la météo n’ayant pas été formidable ces derniers mois, les grains ont germé sur pied, d’autres se sont cassés et surtout l’humidité qui fait monter les frais de séchage (30,5% d'humidité en moyenne). Selon des critères plus que douteux de la coopérative, on m'impose un déclassement de 190 tonnes "d'impuretés", soit 701 tonnes aux normes, ce qui ramène mon rendement à 103 quintaux par hectare. Sauf que les 890 tonnes ont été produites donc m'ont coûtés de l'argent : engrais, phyto, électricité pour l'irrigation et le temps passé.
Avec un prix de vente établit aujourd'hui à 170€/t et sachant qu'il y a en moyenne 34€ de frais de séchage/tonnes, soit un prix global de 136€/T. En gros je vais réussir à rembourser mon prêt culture et l’emprunt du tracteur, tout le reste étant déjà payé heureusement. En résumé, il me restera zéro. Même pas la peine de me sortir un salaire, cela pourrait mettre en péril la trésorerie de l’exploitation…
Finalement en 2024, j’aurai travaillé pour la coopérative qui achète ma récolte une misère (en même temps en situation de monopole ils font ce qu'ils veulent), pour EDF, pour le fisc, pour le fournisseur de carburant et j'en passe, mais à aucun moment pour moi et ma famille.
Voilà la réalité, voilà ce que l'on vit nous petits agriculteurs de moins de 100 ha, à croire que c'est fait exprès pour se faire bouffer par les gros. Heureusement que j'ai une autre activité forestière qui me permet de vivre mais aux frais de certains sacrifices car le temps où je suis sur l'exploitation, les travaux forestiers n'avancent pas et donc l'argent ne rentre pas ».
Lorsqu’on lui demande s’il perçoit des aides notamment européennes en compensation, il nous confirme : « en produisant moins et en mettant des terres en jachère, j’ai obtenu un peu plus d’aide de l’Europe que les années de pleine production mais je ne produis pas pour avoir des aides, je produis pour vivre de mon travail. Nous ne sommes que 2 sur Garrosse, les agriculteurs de Morcenx et Sinderes ont préféré mettre leurs terres en location ou les ont vendu à de gros exploitants (et ils ont bien eu raison). L'agriculture française est dans la panade. Seuls les gros, "les farmers" "les agrobusinness man" qui ont des milliers d'hectares et qui peuvent diversifier les cultures, peuvent s'en sortir, nous, les petits, sommes voués à être englobés voir à disparaître sauf si on se plie aux exigences des lobbies agroalimentaires. Lorsque je privilégie la qualité à la quantité, je dérange car je coûte cher en logistique. Il faut dire aussi que nos gouvernants ne sont pas assez patriotes ».
Pas sur que ce témoignage d’une grande lucidité ne suscite beaucoup de nouvelles vocations parmi les jeunes qui sont en phase de réflexion sur leur orientation professionnelle…




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