CENTRALE PHOTOVOLTAIQUE : LES RAISONS DU REFUS DE L'ETAT
- La Nouvelle Morcenx
- 24 juin 2024
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Dernière mise à jour : 17 sept. 2024

Dans ses dernières déclarations, le maire de Morcenx accuse la préfète de ne pas répondre aux sollicitations du porteur de projet de création d’une centrale photovoltaïque à Arjuzanx et menace l’Etat d’un recours devant les tribunaux. Il semble être en manque d’informations sur les raisons pour lesquelles l’Etat ne délivre pas les autorisations nécessaires à l’aboutissement de ce projet à rebondissements dont les premiers éléments constitutifs remontent à 2010 (enquête publique pour le défrichement de parcelles supportant les futures centrales photovoltaïques). En 2017, la société Valorem qui a obtenu une promesse de bail emphytéotique deux ans plus tôt après le désistement d’EDF de poursuivre le projet, obtient le permis de construire (sous réserve d’obtention de dérogations). Valorem s’engage notamment à rembourser à l’Etat les aides versées à la commune dans le cadre du reboisement des parcelles après la tempête Klaus. La commune s’engage à reboiser 50ha en compensation de la surface utilisée par la centrale. En 2017, avant la délivrance des permis, une enquête publique met en évidence une forte opposition notamment du syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest ou de la Sepanso (association de défense de l’environnement) qui dénoncent notamment la faiblesse des études d’impact avec des risques de déstabilisations de l’équilibre forestier, écologique et hydrographique des zones visées. A cette époque, le préfet de région demande à ce que les promoteurs réexaminent les enjeux faunistiques en recherchant des solutions d’évitement des secteurs sensibles pour « atteindre un niveau de prise en compte de l’environnement plus satisfaisant ». Le 22 février 2018, le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN) émet un avis défavorable au projet de déboisement des parcelles pour lequel une dérogation est demandée, indiquant un manque de prise en considération de la faune et la flore locale. Le 4 novembre 2019, le CNPN émet encore un avis défavorable au projet soulignant que les réponses apportées par le promoteur sont insatisfaisantes et conclu dans des termes plus vifs : « Le CNPN regrette que le développement des énergies renouvelables se fasse systématiquement aux dépens de la biodiversité et de la nature. Il est dommage de devoir systématiquement opposer les deux sujets. Pour un tel projet photovoltaïque, cette consommation d’espaces naturels aurait pu être évitée en proposant une installation en zone déjà urbanisée, au-dessus d’entrepôts ou de parkings par exemple, comme cela se fait dans d’autres régions (même si ce type d’espace est très réduit sur la commune d’Arjuzanx). » Le 9 janvier 2023, tout en reconnaissant l’effort du promoteur de répondre aux interrogations de l’Etat, le CNPN émet un troisième avis défavorable à la réalisation de la centrale, précisant que le dossier n’aborde pas le bilan carbone du projet, ne démontre pas que l’implantation prévue est incontournable, n’évolue pas l’impact sur les grues cendrées (« cette lacune est particulièrement grossière » souligne le rédacteur de l’avis), engendre la destruction de vieux feuillus sans compensation… Le CNPN conclut de manière cinglante : « Outre que la justification d’Intérêt Public Majeur du projet ne considère pas la biodiversité à sa juste valeur comparativement aux autres besoins de la société, l’absence de réelle recherche d’alternative n’en renforce pas le bien fondé ». Le CNPN soulève enfin un autre sujet essentiel : le projet et sa proximité avec la réserve naturelle nationale. Il trouve pour le moins contradictoire de vouloir demander le classement de la zone et d’accorder en même temps des permis de construction pour de nouvelles activités à proximité de la réserve. Cet avis avait déjà été livré dans le cadre de l’enquête publique sur le PLUiH du Pays morcenais. Eu égard tous ces éléments, comment reprocher à la Préfète de ne pas délivrer les autorisations nécessaires au démarrage des travaux ? Comment le maire peut-il feindre de ne pas connaître les raisons d’un tel blocage ? In fine, la vraie question à se poser et la compatibilité entre la volonté scientifique et écologique de préservation du territoire et la volonté de tirer profit de ce territoire en y implantant des infrastructures fortement lucratives pour leurs propriétaires et la collectivité, quitte à le faire au détriment de l’environnement. Réserve naturelle ou centrale photovoltaïque… il fallait choisir puisque tous les éléments étaient sur la table ! Cela ne résout pas la question de la valorisation et de l’attractivité du territoire qui nécessite une réflexion collective approfondie.




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