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N°79 : JE CARBURE À LA GARBURE

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« Moi j’aime la soupe !». Eh oui, quand on était petits on nous disait que pour grandir, il fallait manger de la soupe ! Et on y croyait, d’autant que les anciens assis aux pieds des chenets de la cheminée en mangeaient une assiette à dix heures pour le casse-croûte, avec en plus une tranche de jambon de Bayonne et un morceau de fromage de  brebis.


Il faut dire qu’à l’époque on fonctionnait à l’heure vieille, c’est-à-dire celle qui était indiquée par le soleil. Alors, on avait près de deux heures de décalage avec le reste du monde, et le repas de midi était plutôt fixé à quatorze heures ! Quand papi prenait sa clef pour remonter la pendule qui égrenait les heures, mamie mettait la marmite à cuire sur la cuisinière, car en ce temps là on mangeait de la garbure.


Est-ce que c’était de la soupe ou un plat, personne ne savait le dire, mais l’essentiel  c’était de planter sa cuillère dedans, et qu’elle y reste droite, totalement figée tellement la soupe était consistante. Certains béarnais se l’appropriaient, mais bon « cela restait des Béarnais », disaient les grands-parents, car on savait que vers Pau, ils n’étaient comme nous dans les Landes.


Quand la grand-mère préparait la garbure, tout le jardin passait entre ses mains, car dans les faits il y avait au moins autant des recettes de garbure, qu’il y avait de foyers landais ! Chacun la sienne.


-Côté légumes, c’était du chou bleu ou vert, des haricots frais Tarbais, des fèves fraîches, des grosses pommes de terre, des branches de céleri, des navets, des carottes, et des poireaux;

-Côté viandes, au milieu de l’os de jambon de Bayonne séché, il y avait de la couenne de porc, ou de la saucisse de Toulouse, et bien sûr du canard landais, cuisses, cou, cotes séchées appelées « coustous », et des morceaux confits   dans la graisse, car il était indispensable de rajouter du canard landais !


Cette soupe servie bouillante était donc riche en féculents et en viandes. Et une fois avalée, on faisait un grand « chabrot » avec du vin rouge de la maison versé dans l’assiette chaude à calotte. Autant dire qu’une fois avalée, on n’avait plus faim, seule une salade et un morceau de fromage complétait le repas et c’était fini !


Le grand-père revissait son béret noir sur sa tête et sifflait le chien. La grand-mère essuyait ses mains dans son  tablier et se mettait à la vaisselle. C’était le signe que le repas était fini, et qu’il fallait s’en retourner aux champs. Personne ne parlait. L’heure était au recueillement, voire à la sieste pour les plus petits.


Eh oui, quand on carbure à la garbure, on endure le labeur des champs avec plus de bonheur.

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